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La big idea n’est pas morte

Gaëlle Le Grouiec* (Renault) explique pourquoi il est désormais indispensable d’associer la data au processus créatif

Pourquoi est-il important de faire le lien entre data et créativité ?

C’est une conséquence des nouveaux comportements de la société. Nous vivons tous avec nos smartphones à la main jour et nuit, toutes générations confondues, même lorsque nous consultons les médias traditionnels, comme la télévision. Cela oblige les marques à repenser leur manière de s’adresser à leurs clients. Le storytelling doit dorénavant se référer à la digitalisation et à ce qui en est le cœur : la data. Dans le domaine de la création publicitaire, les données nourrissent les insights, le planning et le ciblage des campagnes.

Les insights, conçus par les data scientists, nous permettent de comprendre les besoins des consommateurs, leurs aptitudes, leurs attentes et références, et de préciser le brief créatif qui servira à raconter les histoires. Le ciblage nourri par les données nous permet d’identifier les audiences auxquelles nous adressons les messages, mais également les plateformes à privilégier. Le storytelling est un customer journey qui sera aussi varié que les types de profils à cibler. De plus, chaque plateforme a sa propre logique, ses formats et ses best practices.

 À vous entendre, on a l’impression que les métiers du marketing et de la publicité se sont fortement complexifiés, non ?

Oui, la publicité est devenue un domaine d’experts. En même temps, c’est une richesse de réussir à réunir à la même table le créatif et le mathématicien. La big idea n’est pas morte, mais la manière de la trouver n’est plus basée sur l’intuition. À présent, tout est très rationalisé et ce sont les datas insights qui dirigent la quête de l’idée créative. De même, les étapes de planning et de ciblage sont conçues à l’aide de modèles et d’algorithmes, et l’optimisation des campagnes fait de plus en plus appel à l’intelligence artificielle.

 Est-ce que cette nouvelle manière d’exercer ce métier l’a rendu plus coûteux ?

Non, parce ce que le digital et la data ont profondément transformé ce métier. Il aurait pu devenir plus cher si les organisations elles-mêmes n’avaient pas transformé leur manière de travailler. Il est vrai que nous produisons beaucoup plus de contenus. Mais parallèlement rien ne se fait en silos, on trouve des synergies entre les différents canaux et tout est optimisé pratiquement en temps réel, de façon à prioriser les contenus qui procurent les meilleurs ROI. Nous n’avons jamais été aussi proches de ce dont le client a besoin. C’est le bon message, à la bonne personne au bon moment, qui procure le meilleur retour à l’annonceur.

 L’industrie dans son ensemble a-t-elle appris à travailler en intégrant la data ?

L’industrie a compris cette nouvelle réalité, on observe cette évolution chez nos partenaires des écosystèmes créatifs et médias. Ils ont acquis ces nouvelles compétences, soit en recrutant des talents, soit via le rachat d’autres structures. Par ailleurs, il est très important que l’annonceur donne l’exemple en adaptant sa propre organisation. C’est ce que nous avons fait chez Renault, en structurant de manière agile et interdisciplinaire trois piliers au sein du département marketing et communication, à savoir : la data et l’infrastructure (insights, planning et targeting), le content (tous les contenus drivés digital et mobile first) et la gestion de la performance.

*Gaëlle Le Grouiec est directrice de marketing et de communication Europe G9 du groupe Renault.

Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre