Marc de Fougerolles, DGA du groupe Neptune Media, dont fait partie Data Company, explique comment la data peut nourrir la créativité et l’optimisation des campagnes de communication, notamment en ces temps de grande incertitude.
Les marques traversent beaucoup d’incertitudes quant à la stabilisation de la crise économique et sanitaire ce second semestre. La data, notamment prédictive, peut-elle les aider dans leur prise de parole dans un tel contexte ?
La réponse est à la fois oui et non. Commençons par le non. Une prédiction s’obtient à partir de l’analyse du passé et de la prolongation d’une tendance. Cependant, comment trouver des données d’analyse du comportement face à une crise semblable à celle de la Covid ?
En revanche, la prise de conscience sur les méfaits de la surconsommation, amplifiée par l’arrêt brutal du fonctionnement de la planète, doit pousser les marques à intégrer les principes de confiance, d’intérêt, d’utilité et de sens dans le ciblage et la segmentation de leurs audiences. Ce constat, générationnel à l’origine (cf. générations Y et Z), concerne désormais toute la société.
Nous disposons de deux outils majeurs pour y parvenir : le temps réel et les datas itératives, qui ensemble créent un cercle vertueux. Le digital combiné à la technologie permet de brasser de plus en plus de données, issues de médias connectés en permanence, tout en faisant évoluer les modèles des algorithmes au fil de l’eau. C’est la raison pour laquelle la performance se bonifie au fil des campagnes, de jour en jour.
Comment employer la data afin d’améliorer la performance des campagnes ?
Commençons par la base de notre métier. La data permet de cibler finement les populations à privilégier ainsi que de leur adresser des messages ou des offres adaptées et personnalisées. Les créations publicitaires varient en fonction de la segmentation des audiences. Mais cela ne s’arrête pas là, puisque le ciblage peut être perfectionné et optimisé tout au long de la campagne, en fonction des données collectées en temps réel.
Intégrer une stratégie data & créativité dans la communication, c’est comme passer de l’eau de puits à l’eau courante. La matière première est quasi identique et provient d’une même source. C’est la distribution de l’eau (soit la diffusion du message) et l’usage que l’on en fait qui subliment l’expérience utilisateur.
À condition cependant de privilégier le numérique, sans lequel l’optimisation au fil de l’eau serait impossible. Seul le digital permet de capter aisément les retours des campagnes en temps réel. Par ailleurs, nous vivons dans une géométrie de plus en plus omnicanale, ce qui facilite encore plus les choses : nous pouvons tester les canaux qui fonctionnent le mieux pour se concentrer sur ceux qui procurent le meilleur ROI. Dès les premiers résultats, nous pouvons adapter et modifier une campagne.
Prenons l’exemple d’une association menant une campagne d’appel aux dons, dont la cible initiale est les 45-50 ans, mais qui se rend compte que sa campagne cartonne auprès des jeunes. Même si ces derniers donnent moins, le ROI est alors bien plus intéressant auprès de cette cible, car le ciblage et le recrutement coûtent bien moins cher. L’association pourra ainsi ajuster sa campagne dès l’analyse de ces premiers résultats.
Quel rôle la data peut-elle avoir dans les campagnes de branding et de sensibilisation ?
Une campagne de branding ou de sensibilisation mal adressée, diffusée par exemple à une personne n’ayant aucune affinité avec la marque, peut avoir des conséquences très néfastes. Le digital a exacerbé l’individualité des gens. Le niveau d’exigence de chacun à l’égard des marques et la manière dont ces dernières s’adressent aux consommateurs n’ont jamais été aussi prépondérants. Pour les marques, cela suppose de connaître, non seulement les centres d’intérêt, profils, comportements, historiques d’achats, etc. des individus, mais également les valeurs de ces derniers.
Les valeurs sont à l’origine de ce qui motive les gens, de ce qui les pousse à s’engager. C’est extrêmement important. C’est pourquoi la data psychographique devient tendance. Elle consiste à classer les individus en fonction de leurs valeurs. Je crois fortement que les nouveaux enjeux porteront sur l’interaction et les valeurs qui influent les motivations. Pour les massifier et les analyser en fonction des populations et des territoires, il faut étudier les retours des campagnes portant des messages diffusant des socles de valeurs bien déterminés. C’est en tout cas une piste à explorer.
Que propose Data Company précisément ?
Data Company propose des prestations toujours complémentaires et différenciantes basées sur des jeux de données adaptés aux cas d’usage et des travaux de data science. Voici deux exemples pour l’illustrer.
Sur une opération d’acquisition de leads, nous allons partir d’un socle de données restreint pour l’enrichir et en extraire le maximum de connaissance. À partir, par exemple, du prénom/nom, e-mail et code postal de la personne, la qualification portera sur ses revenus, son profil de consommation, son âge et sur son score transactionnel, c’est-à-dire son niveau d’appétence présumé.
Autre exemple : Ethix, projet que nous avons mis en place pour analyser la performance des campagnes data driven à de fins d’optimisation. Il s’agit d’analyser l’historique CRM d’une marque sur une dizaine d’années à l’aide également de nos propres données, de classer chaque profil en fonction de la RFM (récence, fréquence, montant) et de la LTV (lifetime value), pour ensuite en identifier les sources de collecte les plus performantes sur le long terme et non uniquement juste après la campagne. L’étape suivante consiste à étudier en masse les messages ou les angles de communication et d’en tirer des analyses et prédictions d’adéquation par les cibles segmentées pour optimiser les adhésions aux valeurs de la marque.
Par ailleurs, nous avons récemment lancé une agence digitale au sein d’Adress Company (filiale du groupe Neptune Media) pour proposer des campagnes davantage data driven. Notre objectif est également de créer un référentiel de campagnes gérées en interne pour accompagner nos travaux d’innovation et notre R&D.
Propos recueillis et édités par Luciana Uchôa-Lefebvre