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« Sans maîtrise la puissance n’est rien »

Pour Philippe Dewost, directeur général de l’EPITA, Grande Ecole d’Ingénieurs en Computer Science partenaire du 6e Grand Prix de la Data, les entreprises qui se servent des adtech et martech doivent veiller à conserver la maîtrise des solutions qu’elles utilisent.

La data et l’IA ont aujourd’hui une place centrale dans les métiers de la communication et du marketing. Vous formez des ingénieurs dans les différents domaines de l’intelligence informatique. Quelle est votre analyse des besoins des entreprises dans ces métiers aujourd’hui ?

Il est indéniable que le marché des adtech et martech est mature, et que le sujet est désormais maîtrisé. En revanche, les entreprises qui utilisent ces technologies ont un besoin profond de compréhension au sujet de ces outils. Même si un grand nombre de sociétés de conseil sont très actives dans l’accompagnement de leurs clients dans le déploiement de ces technologies complexes, disposer en interne de profils d’ingénieur est devenu un enjeu central.

Philippe Dewost
Directeur Général
Epita

C’est pour les entreprises le seul moyen de préserver leur autonomie et leur capacité de comprendre et d’évaluer les outils qu’on leur vend, d’en garder la maîtrise plutôt que d’en devenir dépendantes. Ce besoin ne fait que se renforcer à mesure que la révolution numérique devient une réalité partout car on se retrouve tous avec des outils extrêmement puissants capables de tout faire. À force de tout externaliser, y compris les volets critiques de votre métier, si vous ne disposez pas de personnes de confiance pour évaluer les limites de la sous-traitance, vous risquez gros. C’est pourquoi la demande pour des ingénieurs compétents et pointus en computer science n’a jamais été aussi grande. Comme le disait Pirelli dans les années 1990, « sans maîtrise la puissance n’est rien ».

Cette montée en puissance des sciences informatiques dans tous les domaines, y compris en communication, est relativement récente. Comment évaluez-vous le marché de travail dans ce contexte ?

Ce besoin pour les compétences en sciences informatiques a explosé et s’est énormément diversifié tout simplement parce que l’informatique et les technologies numériques ont envahi tous les pans de notre existence. On observe à la fois un besoin en volume et en spécificité de métier et d’usage. C’est là que nous avons vu apparaître toutes ces distinctions entre les codeurs, les développeurs et les ingénieurs logiciels qui couvrent tout le spectre allant de l’utilisation de systèmes existants à la conception des systèmes suivants en passant par le paramétrage d’outils. Ces vingt dernières années en Europe, nous sommes devenus beaucoup plus des utilisateurs de systèmes conçus par de plateformes notamment américaines que des concepteurs. Je n’ai rien contre les sociétés américaines, ce qu’elles font est très bien et cela nous permet d’aller beaucoup plus vite et d’être plus efficaces sur nos propres marchés. Mais cela pose la question de la dépendance, comme nous l’avons vu plus haut.

Quel est le profil des professionnels que vous formez ?

Nous formons des ingénieurs en computer science, des professionnels qui ont notamment vocation à devenir des CTO dans les entreprises technologiques. Les ingénieurs en développement logiciel qui sortent de notre école sont capables de travailler dans n’importe quel type d’environnement et de langage. Nous formons également des profils particulièrement adaptés au domaine de la data en général pour le marketing et la communication. Je me réfère à celles et ceux  qui suivent notre majeure SCIA en intelligence artificielle. Ces professionnels sont rompus à l’usage de modèles d’analyse et d’entrainement permettant de faire des arbitrages en temps quasi réel à des fins d’optimisation. Un autre domaine pour lesquels les besoins sont massifs est celui de la cybersécurité. Nous formons plusieurs dizaines d’ingénieurs spécialistes de ces questions sur les 700 qui sortent diplômés de notre école chaque année.

Les domaines que vous couvrez sont très variés, de l’IOT à l’IA, de l’informatique quantique à la blockchain sans oublier la réalité virtuelle et augmentée. Quel est le profil des entreprises qui viennent recruter des stagiaires chez vous ?

Tout type de profil, de la start-up au grand groupe dans tous les secteurs. On retrouve par exemple des grandes entreprises de services numériques, mais également des entreprises telles que l’Assistance publique hôpitaux de Paris pour des besoins d’imagerie, de système d‘information médicale, de système d‘information hospitalier et de cybersécurité. L’école couvrant tout le champ des technologies logicielles, ces besoins étant présents partout et variant d’une entreprise à une autre, nos ingénieurs sont capables de s’adapter à n’importe quel type de situation avec des capacités analytiques et opérationnelles inégalées.